Alors que les séries apparaissent comme un créneau toujours plus fort pour les diffuseurs français, le groupe Canal+ relance et "rebrande" Jimmy. L'une des plus anciennes chaînes thématiques hexagonales, que l'on aurait crue un temps délaissée, bénéficie depuis le 18 février d'un repositionnement de sa grille et d'une nouvelle identité visuelle. Olivier Schaack, Directeur Artistique du groupe Canal+, et Olivier Degrave, Directeur Artistique adjoint en charge des antennes, nous présentent cette dernière.
un nouveau logo comme un tatouage
Souvenons-nous : il y a 3 ans, Canal+ rhabille la quasi-totalité de ses antennes thématiques. Jimmy passe au travers des mailles du filet jusqu'en 2013, lorsque le Groupe décide de relancer la chaîne. Un appel d'offres est alors organisé, mettant en compétition 3 agences britanniques et helvétique.
« Les 3 projets qui nous ont été présentés tenaient vraiment la route, c'étaient 3 concepts forts », raconte Olivier Schaack. « Nous avons décidé de retenir l'habillage proposé parRamon & Pedro. Parallèlement, Marc Lescop avait travaillé en interne sur des pistes d'évolution du logotype de Jimmy. Mais lorsque nous avons vu celui imaginé parDevilfish, nous avons décidé de l'acquérir. »
Le nouveau logo de Jimmy est constitué d'une succession de barres verticales. « Ça rappelle un peu Black Flag », décrypte Olivier Degrave. « Ce logo fonctionne vraiment comme un label, comme un tatouage que l'on vient apposer sur l'antenne. »
De fait, il est au cœur de l'habillage.
la chaîne des mauvais garçons
« Il a été décidé de réaffirmer Jimmy comme une chaîne de séries, avec un positionnement axé sur les antis-héros », explique Olivier Schaack. Les personnages des programmes de Jimmy sont en effet anguleux, tels Ray Donovan, Nurse Jackie ou Marty Kaan (House of lies). Dans un contexte généralisé de baisse des budgets octroyés aux services d'autopromotion, l'habillage tire parti de ces forts caractères en jouant avec leurs punchlines. Il n'y a ainsi plus de barrière nette entre idents, teasers et bandes-annonces : l'habillage dans son ensemble est éditorialisé.
« Nous avons mis en place des promos jouant sur la kinétique, des définitions ou des devinettes type "Qui a dit ?" ou "Qui suis-je ?" », explique Olivier Degrave. « En outre, nous travaillons beaucoup avec les prénoms de nos héros, les mettons en scène. Jimmy aussi est un prénom, du reste. Nous allons en tirer profit dans nos campagnes print, en incrustant des visuels des personnages dans le logo. »
Les jingles pub transforment le logo de la chaîne en prénoms de héros, dans une typo dérivée conçue par Marc Lescop.
rattachement au groupe Canal+
Comme les chaînes MultiThématiques avant elle, Jimmy bénéficie désormais d'un univers visuel propre aux antennes de Canal+. Olivier Schaack rappelle : « une de nos signatures, ce sont des habillages réalisés avec des dispositifs réels, non reproductibles. Jimmy reçoit à son tour cette marque, avec un traitement circulaire de l'image. Il y a bien sûr aussi un gabarit antenne spécifique et la typo CanalDin, commune à toutes les chaînes thématiques. »
À gauche, traitement circulaire de l'image propre à Jimmy ; à droite, utilisation de la CanalDin à l'antenne.
Crédits :
Canal+ - Direction Artistique : Olivier Schaack, Olivier Degrave
Ramon & Pedro : Antoine Tinguely, Laurent Fauchère
Samedi 21 septembre, le groupe Canal+ a lancé la 5ème déclinaison de sa chaîne phare avec une antenne entièrement dédiée aux séries. Un enjeu stratégique alors que le succès d'audience et l'impact culturel de ces programmes se confirment de jour en jour et que la compétition se fait toujours plus rude : bouquets concurrents, chaînes gratuites, nouveaux acteurs issus du Net... mais surtout le téléchargement illégal, alimenté par le refus de nombreux accrocs d'attendre la diffusion de leurs séries préférées sur les chaînes françaises.
Dans ce contexte, comment positionner et identifier une chaîne comme Canal+ Séries ? Olivier Schaack, Directeur Artistique de Canal+, nous a présenté les choix du groupe pour sa nouvelle-née.
décliner l'identité de Canal+
C'est une évidence qu'il convient de rappeler : Canal+ Séries est une déclinaison de l'antenne premium et s'inscrit donc dans une logique de bouquet, avec une identité cohérente. « Nous sommes repartis de notre écran coupé en quatre, explique Olivier Schaack. C'est l'un des points clés de l'identité de Canal+, avec les images abstraites et l'utilisation poussée des typographies. Cependant, au bout de quatre ans, nous souhaitions nous donner un peu plus de liberté dans l'exploitation de ce système graphique. Nous avons donc soumis plusieurs pistes à l'agence, qui a réussi à traduire nos réflexions dans l'habillage. »
L'agence en question n'est autre que Devilfish, qui accompagne Canal+ depuis son rebranding en 2009.
un habillage sériel
L'agence a élaboré l'habillage en se référant à se qui caractérise une série : la répétition et le suspense. Ici, le suspense est créé par l'abstraction. Des images de séries diffusées sur l'antenne sont altérées par un dispositif inspiré du Pixelator.
Une précision qui n'a l'air de rien mais est essentielle : comme à l'accoutumée dans l'identité graphique de Canal+, ces images ne sont pas générées par ordinateur. Olivier Degrave, Directeur Artistique on-air, commente : « Nous disposons d'un écran TV, sur lequel on diffuse nos montages d'images de séries à l'aide d'un logiciel de VJing. On appose un filtre devant l'écran et les images sont déformées... Là où ça se complique, c'est qu'en habillage nous devons aligner nos éléments au pixel près. Dans ces conditions, placer et régler une caméra devient très complexe.»
Une démarche qui peut sembler extrême mais est, pour la Direction Artistique, la garantie d'obtenir un habillage au niveau de réalisation digne d'une chaîne premium. « Nous avons évidemment fait des simulations informatiques de cet habillage avant de tourner : nous pouvons vous assurer que le rendu n'a rien à voir. L'identité de Canal+ repose notamment sur l'abstraction et la lumière. Il y a des subtilités concernant cette dernière que l'on ne peut pas obtenir en infographie. De fait, il suffit que l'on change de modèle d'écran TV pour que le rendu de l'habillage change, parce qu'il aura des caractéristiques techniques différentes, etc. En somme, une partie de notre travail consiste aussi à ce que l'identité de Canal soit unique, affirment Schaack et Degrave.
Résultat : les images de séries ne sont plus immédiatement identifiables mais présentent des caractéristiques de couleur ou de mouvement qui peuvent permettre aux abonnés de reconnaître leurs programmes préférés.
Olivier Degrave sourit : « C'est le petit jeu dans l'habillage. 30 ans après, on réinvente le cryptage sur Canal+... Et on retrouve aussi un peu les carrés d'Etienne Robial. C'est l'ADN de cette chaîne et on tient à le préserver. »
À bien chercher, on pourrait aussi retrouver l’ellipse... En effet, l'autre caractéristique principale des séries et de cet habillage est le caractère répétitif. Il se traduit à l'image par des saccades dans certains mouvements. Côté son, la musique composée par Malcolm Goldie (déjà auteur notamment de l'identité sonore de Canal+ Cinéma) renforce ces hoquètements et installe, comme sur les autres antennes du groupe, une signature mnémonique.
Pour promouvoir ses programmes, la chaîne s'est adjoint les services d'une voix familière aux abonnés de Canal+ : celle de Patrick Mancini, qui n'est autre que le doubleur de Dexter dans la série éponyme.
L'accès à Canal+ Séries s'ajoute sans supplément à l'offre proposée à l'ensemble des abonnés Canal+, hors réception par la TNT. Les abonnés dépendants de ce mode de réception peuvent néanmoins accéder aux programmes de Canal+ Séries via le service de replay "Canal+ à la demande".
Crédits :
Canal+ - Direction Artistique : Olivier Schaack, assisté d'Olivier Degrave
Devilfish - Directeur de création : Tom Robinson - Réalisateur : Lee Edwards - Musique : Malcolm Goldie
Si l'habillage antenne est la principale expression de l'identité visuelle d'une chaîne, celle-ci peut également se nourrir d'éléments produits pour d'autres filiales. C'est le cas avec le nouveau moving logo de StudioCanal, dont le graphisme, fidèle à l'esprit de l'habillage de Canal+, a ensuite été décliné sur un nouveau jingle "Création Originale". Un travail de cohérence sur tous les écrans, que nous vous proposons de découvrir ci-dessous.
Créée en 2000 par la fusion du Studio Canal+ (pour la production) et de Canal+ DA (pour les droits audiovisuels), StudioCanal est la filiale cinéma du groupe Canal+. Cette société de production et de distribution vient de bénéficier d'un rebranding piloté par Sophie Kopaczynski, Directrice de la Communication, mais sur lequel est également intervenue la direction artistique.
Olivier Schaack, Directeur Artistique de Canal+, revient pour lenodal sur cette collaboration singulière.
le contexte
"L'équipe de StudioCanal est venue nous voir dans le cadre de l'arrivée de deux filiales : Optimum Releasing (Royaume-Uni) et Kinowelt (Allemagne). Ces studios, acquis respectivement en 2006 et 2008, portent désormais le même nom que la maison-mère", explique Olivier Schaack. "Il s'agissait d'harmoniser leur image à l'échelle européenne mais également de revenir à une identité graphique plus cohérente avec celle de l'antenne. La Direction Artistique a donc été impliquée en qualité de consultante sur ce rebranding ; nous avons pu guider, conseiller nos camarades du pôle cinéma, le tout dans une collaboration européenne puisque nos affiliés allemands et britanniques ont été intégrés dans ce projet."
L'appel d'offres a sollicité 5 agences françaises et européennes : View, Gédéon, Kemistry (GB), Velvet (All) et enfin les Anglais de Devilfish.
Olivier Schaack : "Nous avons présélectionné Devilfish et View à l'issue du premier tour. La proposition de View était très intéressante : un logo animé en 3D, avec ce rendu travaillé qui fait leur spécialité. Il nous a semblé néanmoins que cette approche pourrait être assimilée à celle d'un studio américain. La sensibilité européenne de StudioCanal est un point essentiel de son identité, a fortiori dans un contexte de rapprochement avec Allemands et Britanniques."
C'est ainsi la proposition de Devilfish qui a été retenue, ce qui facilite par ailleurs la cohérence souhaitée avec l'habillage antenne de Canal+, réalisé par cette même agence.
un logo redessiné
L'agence s'est tout d'abord attelée au redesign du logo du studio, dont les lettres ont toutes été passées en roman. "Il a fallu tenir compte de spécificités culturelles et linguistiques", raconte Olivier Schaack. "Par exemple, nos camarades d'outre-Rhin ne voulaient pas entendre parler de l'alternance entre caractères romans et italiques, présente dans l'ancien logo. C'est un tabou typographique, si je puis dire ; ça ne leur plait pas.
Par ailleurs, en Allemand, si "studio" désigne bien un studio, mais plutôt un petit studio de télévision, avec une connotation légèrement 'cheap' dans ce contexte, le mot "kanal" signifie "égouts"...
On a donc choisi d'accoler les deux composantes du nom, jusqu'à fusionner les caractères O et C."
La marque StudioCanal, toujours composée en Futura, s'inscrit désormais en défonce dans un mono-cartouche noir, aux angles arrondis afin de distinguer cette filiale du pôle antenne.
jeux de lumières
Le nouveau moving logo joue sur un code classique et intimement lié au fonctionnement même du cinéma : la lumière. Des faisceaux de couleurs et le logo StudioCanal ont été projetés sur une installation de 25 lamelles de verre en suspension.
Photo prise pendant le tournage
Olivier Schaack explique : "On retrouve la patte de Devilfish et l'image antenne de Canal+ : partir d'un élément concret pour produire une image abstraite. On a vraiment réduit les interventions en post-production au strict minimum, l'essentiel est créé par la structure elle-même. Il me semble que ce moving logo dégage une vraie sensibilité européenne ; une identité qui soit forte sans être imposante."
Derrière la caméra, Harris Zambarloukos : un Chef opérateur renommé, qui a notamment signé la photo des films Thor et Mamma mia.
Le moving logo a été shooté en mono-caméra 35mm. Une version 3D a été créée en post-production, avec "des effets très légers, pour ne pas dénoter avec la simplicité générale du dispositif", confie Olivier Schaack. C'est le compositeur en vogue Alexandre Desplat qui signe la bande originale de l'identité StudioCanal : une mélodie interprétée par un orchestre de 50 musiciens, mêlant entre autres cordes, flûtes et percussions comme le glockenspiel.
Découvrez ce nouveau moving logo (vidéo 4 ci-dessous), avec les précédents éléments utilisés depuis 2003 :
retour vers l'antenne
Si l'identité du pôle cinéma s'est donc inspirée de Canal+, l'antenne elle-même va pouvoir bénéficier de ce récent rebranding. "Nous avons demandé à StudioCanal d'utiliser les rushes de leur moving logo pour rafraîchir notre jingle 'Création originale'. L'actuel dénotait trop avec celui du studio, notamment lorsque vous les visionnez à la suite sur un DVD d'une série. C'est un élément important de notre identité, il véhicule notre image de marque sur de multiples supports autres que l'antenne de Canal. Nous l'avons donc retravaillé en interne de sorte à ce que l'on sente une filiation, tout en créant un élément singulier."
Concrètement, les jeux de lumières sont inclinés et réétalonnés. La césure marquée par le '+' de Canal+ est déportée sur la droite de l'écran, de sorte à ce que le logo puisse bien s'inscrire en son centre. Norbert Gilbert, compositeur de l'habillage sonore de l'antenne, signe une nouvelle fois la bande originale.
Olivier Schaack conclut : "Ce nouveau jingle est en cours d'envoi dans les laboratoires. Il sera intégré progressivement aux masters de nos créations : vous devriez le voir à l'antenne à partir de la diffusion de la nouvelle saison de Mafiosa."
Cette collaboration avec StudioCanal témoigne ainsi d'une volonté de cohérence dans l'identité visuelle de Canal+, sur le petit écran comme sur le grand.
Crédits
StudioCanal - Direction de la Communication : Sophie Kopaczynski
Canal+ - Direction Artistique : Olivier Schaack ; avec Olivier Degrave, Astrid Hughes, Juliette Clerc
Devilfish - Directeur de Création : Grant Gilbert ; Chef opérateur : Harris Zambarloukos ; Musique : Alexandre Desplat